12
HOMMES EN COLÈRE
Un
jeune homme d'origine modeste est accusé du meurtre de son père et risque la
peine de mort. Le jury composé de douze hommes se retire pour délibérer et
procède immédiatement à un vote : onze votent coupable, or la décision doit
être prise à l'unanimité. Le juré qui a voté non-coupable, sommé de se
justifier, explique qu'il a un doute et que la vie d'un homme mérite quelques
heures de discussion. Il s'emploie alors à les convaincre un par un.
12 Hommes en Colère
Réalisation : Sidney
Lumet
Scénario : Reginald
Rose d'après le téléfilm et la pièce homonyme
Musique : Kenyon
Hopkins
Production : United
Artists
Genre : Drame
Titre
en vo : 12 Angry Men
Pays
d'origine : Etats-Unis
Langue
d'origine : anglais
Date
de sortie : 10 avril 1957
Durée : 95
mn
Casting
:
Henry
Fonda : M. Davis, le juré no 8,
architecte
Martin
Balsam : juré no 1, coach de
football américain
John
Fiedler : juré no 2, banquier
Lee
J. Cobb : juré no 3, patron d'une
société de livraison
E.
G. Marshall : juré no 4,
courtier
Jack
Klugman : juré no 5, chômeur
Ed
Binns : juré no 6, peintre en
bâtiment
Jack
Warden : juré no 7, VRP
Joseph
Sweeney : M. McCardle, le juré no 9,
retraité
Ed
Begley : juré no 10, gérant de
trois garages
Jiří
Voskovec : juré no 11,
horloger
Robert
Webber : juré no 12, publicitaire
John
Savoca : l'accusé
Rudy
Bond : le juge
James
Kelly : le garde
Billy
Nelson : un employé de la cour
Mon
avis : Incontestablement, très peu de
films peuvent se targuer d'être à la fois des classiques intemporels, des œuvres
phares de leur genre, des traités profondément bouleversants sur la nature
humaine et, avant tout, des leçons de cinéma tout simplement parfaites. 12
Hommes en Colère est tout cela et encore bien plus, puisqu'il fait
figure de premier film le plus accompli depuis Citizen Kane et
de meilleur film d'un réalisateur, Sidney Lumet, qui ne devait connaître
sa période faste que quinze ans plus tard. En somme, ce chef-d’œuvre
incontestable est, même plus d’un demi-siècle après sa sortie, un des films qui
expriment le mieux la lutte de l'homme entre l'idéalisme et toutes sortes de
diversions plus ou moins nuisibles. Cette étude de caractère hors pair ne
s'encombre d'aucun élément superflu ou insignifiant. Et pourtant, le récit ne
se plie point sous le poids des valeurs qu'il transmet. Au contraire, le
basculement laborieux du vote des jurés fonctionne comme un thriller palpitant,
sous la chaleur étouffante de la pièce qui colle littéralement le spectateur
sur son fauteuil ! Et donc, même après l'avoir vu environ une demi-douzaine de
fois, je suis toujours autant fasciné par le suspense que le scénario génial
crée à coups de détails minutieux. Le rassemblement progressif du puzzle, qui
fera tomber les jurés trop sûrs d'eux un par un, demeure cependant
exceptionnellement sobre, voire anodin. A l'image de cette dispersion finale et
définitive, le scénario ne prétend jamais à ce qui se passe dans cette pièce
étouffante soit vraiment exceptionnel dans le fonctionnement implacable de la
justice. Et pourtant, la plupart des motivations honnêtes ou intéressées qui
constituent le spectre du comportement humain y passent en revue, sans que le
trait ne soit jamais forcé – une des grandes forces, justement, du film.
Certes, le mécanisme d'expression sociale ne fonctionnerait probablement plus
de la même façon de nos jours et d’ailleurs, le fait que la quasi intégralité
de l’intrigue se déroule dans la même pièce et que la caméra bouge à peine
pourrait en gêner plus d’un spectateur moderne qui trouverait tout cela « chiant
au possible et sans intérêt ». Cependant, le scénario magnifique de
Reginald Rose sait garder les particularités qui dateraient l'action à un
strict minimum. Pour contrebalancer l'idéalisme éclairé du juré, Henri Fonda
bien sûr, par qui le raz de marée commence, la mise en scène, incroyablement
maîtrisée pour un premier film de cinéma, laisse planer le doute sur la
procédure entière. Car justement, et c’est là aussi l’une des grandes forces
pour ne pas dire le coup de génie de ce 12 Hommes en Colère :
et si l'accusé était vraiment coupable ? Et si, à force de chercher des
incohérences dans l'édifice des preuves, les partisans du « non
coupable » ne pèchent par un excès de zèle aussi peu justifié que
l'acharnement de leurs adversaires bornés ? Lumet et Rose n'imposent aucune
solution facile à ce dilemme qui est, en fin de compte, celui de la quête
impossible d'une vérité absolue. Et alors, quand tombe le verdict, que les
douze jurés décident, au vu de leurs nombreux doutes, de déclarer l’accusé non
coupable, le spectateur ne peut s’empêcher de se dire que si ça se trouve, ils
se sont tromper, que oui, ce jeune homme accusé de parricide a bel et bien tué
son père de sang-froid et qu’il y a eu, du coup, une erreur judiciaire. Mais au
vu de tous ces doutes, qui sait si l’accusé n’était pas innocent, qui sait si,
par le biais d’une âpre lutte, les jurés ne viennent pas de sauver un innocent
de la chaise électrique ? Oui, comment savoir ? La vérité, personne
ne la connaitra jamais, seul subsistera ce fameux doute. Bien évidemment,
l'interprétation de l'ensemble des acteurs est simplement excellente. Ainsi,
que ce soit Henri Fonda, bien sûr, mais les autres ne sont pas en restes,
chacun sait garder parfaitement la tension palpable, sans s'adjuger des
capacités qui tireraient son personnage de la médiocrité qui le caractérise.
Même Henri Fonda, alias le juré n° 8 ou celui par qui tout bascule, ne sait
résoudre l'affaire par ses propres forces, il a besoin pour cela du soutien et
des idées des autres. Mais la petite révolution exemplaire n'aurait pas eu lieu
sans son sursaut de courage, s'il n'avait pas pris la peine de s'interroger sur
ses doutes. Ajoutons à cela le cadre hautement oppressant, ce huit clos
quasiment infernal tant par l’ambiance que par la chaleur et les tensions entre
les jurés, cette caméra, quasiment toujours fixée sur la table autour duquel se
trouvent les douze hommes et qui ne fait que quelques incursions quand ceux-ci
se lèvent ou pour de somptueux gros plans sur tel ou tel juré, ce retournement
de situation progressif, ces nombreux questionnements et préjugés de chacun –
après tout, ces douze hommes sont représentatifs d’une certaine Amérique
blanche et le présumé coupable, pour le peu qu’on voit de lui, pourrait être un
latino, ce qui entrainera des remarques par la suite de l’un des jurés
sur « ces gens-là ». Tout cet ensemble d’éléments – et
encore, j’en oublie à coup sur – fait que, indéniablement, 12 Hommes en
Colère n’est pas un grand film mais un pur chef d’œuvre, d’ailleurs,
l’un des plus grands de l’histoire du septième art. Alors bien sûr il date un
peu, certes, il ne correspond plus aux canons actuels et non, il ne pourrait
pas avoir été fait de nos jours, mais le génie, lui, est présent, et,
accessoirement, pas qu’un peu. Un film à voir et à revoir encore et encore, qui
n’a rien perdu de son intérêt malgré les nombreuses années écoulées et qui se
doit d’être vu, au moins une fois, par toute personne qui se prétend fan de
cinéma, mais le vrai, bien sûr… les connaisseurs m’auront compris…
Points
Positifs :
-
Un des plus grands films de tous les temps, rien que ça et qui, au passage, n’a
absolument rien perdu de sa force et de son intensité narrative, plus de
soixante ans après sa sortie. La marque des chefs d’œuvres, incontestablement !
-
Malgré le coté plutôt sobre du film – tout se joue dans la même pièce – nous
avons droit a un exceptionnel huit-clos captivant au possible qui, tout en
montrant 12 hommes tous parfaitement représentatifs de ce que pouvait être l’Amérique
des années 50, met surtout en avant ce que devrait être la justice, c’est-à-dire,
quelque chose que l’on ne peut pas traiter par-dessus la jambe, quelque chose
qui mérite que l’on aille au fond des choses, surtout si la vie d’un homme est
en jeu.
-
Un Henri Fonda tout simplement lumineux, mais il n’est pas le seul à crever l’écran
et l’ensemble des jurés marquent, chacun a sa manière, les esprits.
-
Une ambiance a couper le couteau, dut, bien entendu, au fait que toute l’intrigue
a lieue dans une seule pièce, surchauffé par la température et les tensions.
-
La manière dont, un après l’autre, Henri Fonda réussi à convaincre les autres
jurés que, effectivement, il y a un doute raisonnable pour ne pas condamner l’accusé
a la peine capitale.
-
Le plus fort, finalement, c’est qu’on ne sait pas si l’accusé était innocent ou
non ; après tout, seul subsiste ce fameux doute…
Points
Négatifs :
-
Un film qui ne plaira sans nul doute pas au public moderne tellement il est aux
antipodes de ce qui se fait de nos jours. Ce n’est pas un défaut, certes, mais
il faut le prendre en compte au cas où vous n’auriez jamais vu ce 12 Hommes
en Colère et que vous ne soyez pas habitué a ces vieux films, décidément, d’une
toute autre époque…
Ma
note : 10/10
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