POLISSE
Le
quotidien des policiers de la BPM (Brigade de Protection des Mineurs) ce sont
les gardes à vue de pédophiles, les arrestations de pickpockets mineurs mais
aussi la pause déjeuner où l’on se raconte ses problèmes de couple ; ce sont
les auditions de parents maltraitants, les dépositions des enfants, les dérives
de la sexualité chez les adolescents, mais aussi la solidarité entre collègues
et les fous rires incontrôlables dans les moments les plus impensables ; c’est
savoir que le pire existe, et tenter de faire avec… Comment ces policiers
parviennent-ils à trouver l’équilibre entre leurs vies privées et la réalité à
laquelle ils sont confrontés, tous les jours ? Fred, l’écorché du groupe, aura
du mal à supporter le regard de Melissa, mandatée par le ministère de
l’intérieur pour réaliser un livre de photos sur cette brigade.
Avant
de rentrer dans le vif du sujet, c’est-à-dire, la critique à proprement parler
de ce film, je souhaiterais vous raconter une petite anecdote qui résume
parfaitement le côté « tête en l’air »
que je suis bien souvent : en effet, cela fait longtemps que j’attends la
sortie en DVD d’un certain film français qui a tellement bien marché qu’il a
tout simplement triompher dans une certaine petite cérémonie inconnue que l’on
surnomme les Oscars – c’était il y a une semaine environ, pour ceux qui suivent
l’actu cinématographique. Ce film, bien entendu, c’est The Artist, avec, en tête d’affiche, un certain Jean Dujardin –
Oscar du meilleur premier rôle masculin, quand je pense d’où il vient, que de
chemin parcouru ! Bref, cela fait longtemps que j’ai envie de voir ce
film, ne serais ce que pour m’en faire ma propre opinion, et franchement, je
dois avouer que l’attente commence à se faire longue. Surtout que cela fait
plusieurs fois que je suis persuadé que The
Artist est déjà sorti en DVD alors que ce n’est pas le cas ! Tenez,
pas plus tard que samedi dernier, j’ai réussi à convaincre ma femme de m’accompagner
a Carrefour pour acheter le film ;
or, que nous arriva-t-il, comme vous pouvez vous en doutez ? Bien entendu,
on ne l’a pas trouvé. Du coup, j’ai encore une fois insulté copieusement cette
enseigne de la grande distribution, surtout que, depuis un certain litige avec
Playmobil (à l’occasion, je vous en parlerais), je l’ai dans le collimateur, en
criant sur tous les toits que quand on cherche quelque chose, il ne faut surtout
pas aller à Carrefour ! Puis,
après avoir finis de me ridiculiser le dimanche, en affirmant que oui, le DVD
était sorti mais que, décidément, Carrefour,
c’est de la daube, je me suis rendu compte, le soir, qu’il m’aurait été
particulièrement difficile de me procurer The
Artist vu que le DVD ne sort que le… 14 mars ! Bref, j’ai encore perdu
une bonne occasion de me taire.
Mais
au fait, quel rapport avec Polisse,
car bon, comment dire, après tout, ce billet est consacré à la critique de l’œuvre
de Maïwenn et en aucun cas à mes péripéties dans des magasins ? Eh bien,
disons qu’en tant que vieux roublard que je suis, je ne suis pas revenu les
mains vides ; bon, déjà, à la base, je comptais convaincre ma femme que l’on
achète les deux films (oui, je sais, je fais partie des dernières personnes en France
à acheter encore des DVD), même si j’avais une nette préférence pour The Artist s’il fallait n’en prendre qu’un ;
celui-ci n’ayant pas été trouvé, puisque pas encore sortit, je me suis rabattu –
enfin, façon de parler – sur un autre film qui m’intriguait depuis pas mal de
temps et que j’avais également hâte de voir : ce fameux Polisse.
Bien
évidemment, et je pense ne rien apprendre à personne (sauf les éternels étourdis,
si, si, ils existent), Polisse
signifie Police, mais écrit façon « enfants »,
les omniprésentes « victimes »
du film, l’élément central de celui-ci, puisque dans cette œuvre, comme chacun
sait, on suit les péripéties quotidienne de la Brigade de Protection des
Mineurs (BPM) parisienne. Mais ici, nous sommes loin d’un banal film policier
comme le septième art peut nous en offrit à foison chaque année (en fait, il
nous les refourgue par semi-remorques entiers) et la problématique de Polisse n’est pas de nous ressortir les
habituelles rengaines entre différences entre cinéma français, que l’on
qualifiera d’auteur, d’intello, d’intellectuel, et l’autre, celui d’outre-Atlantique,
de chez l’Oncle Sam, avec dix cascades a la minute, des explosions a tout vas,
des coups de feu par centaines et des méchants bien méchants et des gentils
tout gentils. Non, car, quelque part, Polisse
est au-delà de ces simples querelles de clocher qui, à force, peuvent lasser le
simple quidam ; quoique, pour être objectif, nier que Polisse est une œuvre d’auteur serait lui enlever une part de sa
substance, de ce qu’il est véritablement. Mais ici, attention car quelque part,
l’œuvre de Maïwenn est presque aussi éloignée des films policiers français que ceux-ci
le sont de leurs homologues US.
En
effet, ce qui choque tout d’abord dans Polisse,
et c’est ce qui a pu déplaire à bon nombre des détracteurs de ce film, c’est
que l’on se croirait presque dans un documentaire ; ici, et cela est
surtout flagrant dans la première partie du film, les scènes et les situations s’enchainent
les unes aux autres, sans véritable fil conducteur – celui-ci n’apparaissant qu’au
fil de l’intrigue, lorsque le spectateur est déjà familiariser avec les
nombreux protagonistes et que quelques liens, comme l’histoire d’amour entre la
photographe – jouée par Maïwenn – et Fred – notre Joey Starr national – par exemple
font leurs apparitions ; mais ceux-ci étant également nombreux, et les
divers « affaires » se
succédant les unes aux autres, tout cela a dut en refroidir plus d’un tellement
cette réalisation est aux antipodes de ce que l’on a l’habitude de voir au
cinéma. Car dans Polisse, que l’on ne
se trompe pas, pas d’affaire principale, pas de réseau pédophile a démanteler,
pas de criminels à arrêter, non, à la place, tout juste la vie d’hommes et de
femmes qui font leur boulot, franchement pas simple, et des affaires qui se
succèdent les unes aux autres, toutes plus terribles les unes que les autres,
et, accessoirement, assez variées. Et là, nous arrivons au second point qui en
a refroidi plus d’un : l’extrême violence du film. Pas de violence
physique au sens premier du mot, comme on l’entend d’habitude, non, plutôt une
violence crue, terrible car touchant des enfants, souvent victimes de viols, de
la part de proches ou d’autres, rien n’étant, a aucun moment, caché : dans
Polisse, et comme on pourrait le voir
dans un banal documentaire, on appelle un chat un chat, même si cela déplait à
certains, même si cela peut être terrible… car finalement, ne nous leurrons
pas, la réalité, aussi terrible soit-elle à admettre, c’est cela. Et, sincèrement,
cela fait froid dans le dos.
Mais
ce qui sublime ce film, avouons-le, c’est le formidable casting de celui-ci. En
effet, jugez du peu : entre Karin Viard, JoeyStarr, Marina Foïs, Nicolas
Duvauchelle, Emmanuelle Bercot, Frédéric Pierrot, Naidra Ayadi, Sandrine
Kiberlain, Anthony Delon (eh oui !), Audrey Lamy, Alain Attal et, bien
entendu, Maïwenn, force est de constater que, non seulement, celui-ci est
imposant (et encore, j’ai fait court), mais qu’en plus, entre talents
confirmés, vieux loups et vedettes en devenir, tous ces acteurs et actrices,
engagés, impliqués comme rarement, insufflent au film une force peu commune,
et, du plus petit rôle au têtes d’affiches, chaque visage, chaque intervention
marquent les esprits. Et si, bien entendu, pour la plus part des acteurs et
actrices citées précédemment, je ne me suis pas étonner de les voir fidèles à eux-mêmes,
force est de constater que je ne pouvais pas écrire une critique de Polisse sans m’attarder sur la figure
marquante de celui-ci : le si décrié JoeyStarr. Bon, franchement, là où
certains de ses nombreux détracteurs n’y ont vu que la confirmation de ce qu’ils
pensaient déjà à son sujet – pas grand-chose de bien, je leur laisse seuls
juges de leurs opinions – personnellement, j’ai été bluffé par l’ex Co leader
de NTM. Oui, JoeyStarr n’est jamais aussi bon que lorsqu’il gueule, qu’il pète
une durite, comme cela arrive dans le film, mais à côté de ça, dans le cas
présent, ce que j’ai surtout retenu de sa prestation, ce furent les scènes plus
intimistes qui collaient si bien à cet éternel écorché à vif : la plus
flagrante étant celle de la séparation, forcée, d’un enfant et sa mère, tout
bonnement terrible. Je connais JoeyStarr depuis les tous débuts de NTM (j’avais
même la K7 de Authentik, à l’époque,
le rap avait tout de même une certaine classe) et franchement, si on m’avait
dit qu’un jour, celui-ci me toucherait au point que j’étais à deux doigts de
verser une petite larme, et ben, comment dire, je pense que j’aurais tout
bonnement explosé de rire ! Comme quoi, tout arrive, et c’est parfois tant
mieux.
Indéniablement,
et même s’il n’est pas exempt de défauts (mais quelque part, des défauts, on
pourrait en trouver partout, y compris dans les plus grands chefs d’œuvres), Polisse est tout bonnement l’un des
meilleurs films français de l’année 2011, partageant le haut de l’affiche avec,
bien entendu, The Artist, multi primé
un peu partout à l’étranger – et que j’aimerais bien voir pour voir ce qu’il
vaut – mais aussi, ne l’oublions pas, Intouchables,
véritable raz de marée en France l’année dernière, et dont je vous avais
proposer la critique il y a quelques mois sur ce même blog. Trois films assez différents,
aux sujets variés et touchant parfois un public assez large et n’ayant pas grand-chose
en commun, mais trois films, trois œuvres qui viennent nous démontrer deux
choses : tout d’abord, que le cinéma français se porte plutôt bien quand
on y pense, mais aussi, et The Artist
est là pour le prouver, que celui-ci n’a, parfois, franchement rien à prouver à
l’américain. D’ailleurs, sur ce point, je pense qu’à un moment donné, il serait
peut-être bon que nous autres, le public, arrêtions avec cette manie ridicule
de critiquer le cinéma français (ou européen en général) pour ne s’extasier que
devant moult daubes à grand spectacle. Nous aussi nous savons faire de bons, de
très bons films, et je pense qu’il est bon de le rappeler de temps en temps. Plus
particulièrement après s’en être rappeler suite au visionnage de cet excellent
long métrage qu’est The Polisse.
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