LE
NOM DE LA ROSE
En
1327, alors que la chrétienté est divisée entre l'autorité du pape Jean XXII et
celle de l'Empereur Louis IV du Saint-Empire, l'ex-inquisiteur Guillaume de
Baskerville se rend dans une abbaye bénédictine, située entre la Provence et la
Ligurie, accompagné par son novice Adso qui est le narrateur de l'intrigue.
Dans un climat de conflit théologique entre les franciscains et l'autorité
pontificale au sujet de la pauvreté du Christ – servant avant tout de façade au
conflit politique entre le pape et l'empereur – l'ancien inquisiteur doit
reprendre sa charge à la demande de l'abbé, à la suite de la mort suspecte d'un
des moines. Rapidement, ce que beaucoup semblaient considérer comme un suicide
prend des allures de plus en plus inquiétantes. Lorsque l'inquisiteur
dominicain Bernardo Gui se rend à l'abbaye à la demande du pape, et commence à
se mêler à l'enquête, cela est loin d'arranger les choses. Le Nom de la rose est une histoire en sept chapitres, chiffre
symbolique qui représente le nombre de jours et d'étapes de l'enquête ainsi que
le nombre approximatif de morts. L'histoire est bornée par le récit de la
découverte du manuscrit que l'auteur prétend traduire, et par les conclusions
du narrateur devenu vieillard.
Il
y a de cela presque un an, a quelques semaines près (c’était le 28 décembre
2010 pour être exact), je vous proposais sur ce blog la critique de ce que je
considère comme étant l’un des tous meilleurs films des années 80, et, accessoirement,
le meilleur rôle de ce très grand acteur qu’est Sean Connery, je veux bien
évidement parler du Nom
de la rose. Réussite absolue selon moi, œuvre que je ne me lasse pas de
voir et de revoir, je vous avais dit à l’époque que je n’avais jamais eu l’occasion
de lire le roman original, considéré par beaucoup comme un chef d’œuvre absolu
et écrit par Umberto Eco. Et donc, il y a un an, je faisais part de mon envie
de m’y attaquer « un de ces jours »
comme il me plait tellement à le dire, histoire de voir ce que ce roman, dont
tellement de personnes louaient les mérites depuis tant d’années, avait dans le
ventre (comme on dit) ; ainsi, quelques mois plus tard (un de ces jours en
gros), et après avoir dévorer un autre chef d’œuvre dont l’intrigue se déroule
au Moyen-âge – Les piliers de la
terre de Ken Follet – je me suis finalement lancer dans le célèbre Le nom de la rose.
Il
n’est décidément pas facile de lire un livre après avoir vu son adaptation à l’écran
car, forcément, on ne peut s’empêcher de faire des comparaisons ; certes,
le contraire est valable également, cependant, avec un film, on sait par avance
que ça sera plus simple, que bon nombre d’éléments seront abandonnées et que le
mot d’ordre principal sera « raccourcis,
raccourcis et… raccourcis ! ». Mais quand on passe d’une adaptation
cinématographique au roman dont celle-ci est originaire, et qu’en plus, le film
est excellent et le livre, lui, encore meilleure, force est d’admettre que c’est
une toute autre paire de manches. Mais bon, je savais à l’avance qu’elles
montagne je m’apprêtais à escalader, qu’elles difficultés allaient m’attendre
et que, forcément, j’allais en baver. Mais à ce point, franchement, non. Heureusement,
le résultat final fut à la hauteur de mes espérances et sur ce point, inutile
de le cacher plus loin, oui, Le nom de la
rose, le roman, est un véritable chef d’œuvre ! Mais que ce fut dur !
Pour
être tout à fait franc, je n’ai jamais, au cours de ma vie, lu un roman aussi
complexe si je mets de côté Les frères
Karamazov de Fiodor Dostoïevski (commencer il y a près de quinze ans et
jamais achever), ou, du moins donc, lu un livre jusqu’au bout aussi dur. Car oui,
Umberto Eco n’y est pas allé de main morte dans Le nom de la rose : ceux qui ont vu le film et qui ne se
doutaient pas à quel point le roman pouvait être aussi ardu ont dû ressentir un
sacré choc dès les premières pages, et d’ailleurs, je ne m’en cache pas, ce fut
mon cas. Car ici, que l’on ne s’y trompe pas : tout est complexe !
Que ce soit le style de l’auteur, assez lourd parfois et qui n’hésite pas à s’attarder
sur je ne sais combien de pages sur mains sujets annexes (ou, du moins, le
crois t’on car tout a son importance) ou bien ces dialogues qui n’en finissent
jamais, et là aussi, toujours sur des sujets parfois éloignés de l’intrigue
principale (l’enquête sur les meurtres dans l’abbaye) et qui pourtant, n’en
sont pas moins nécessaires pour que le lecteur comprenne la toile de fond de l’histoire
mais aussi et surtout, le parti pris d’avoir parsemer le livre de phrases en
latin, et non traduites, peut indéniablement en rebuter plus d’un. D’ailleurs,
un petit mot, justement, sur ce latin utiliser à chaque page du roman, que ce
soit par de simples phrases voir même sur des paragraphes : qu’aurait dut
faire Umberto Eco ? Le traduire ? Personnellement, et au risque d’alourdir
encore plus le texte, je pense que oui – du genre, la phrase en latin puis sa
traduction entre parenthèses – car du coup, la majeure partie des lecteurs du Nom de la rose, qui ne comprennent rien
au latin, se trouvent privés d’une bonne partie des dialogues, chose que je
trouve hautement dommageable, bien entendu et qui a dut en faire abandonner
plus d’un, s’en suis sûr. Mais si l’utilisation du latin était nécessaire pour
le coté immersion dans l’histoire et si sa non traduction est, selon moi, un
point faible (et pas un petit) de cette œuvre, force est d’admettre qu’il s’agit
du seul.
Car
pour le reste, tout le reste, Le nom de
la rose est un pur chef d’œuvre, comme je m’y attendais. Je ne reviendrais
pas sur l’histoire, connu de tous, que ce soit par le biais du roman ou du film
(il suffit de relire ma critique
de celui-ci où je m’attarde davantage sur l’intrigue), tout au plus, et comme
il fallait s’y attendre, je me contenterais de vous dire que celle-ci est bien
plus complexe ; car si dans le film, le choix spectaculaire de l’enquête
était poussé à son paroxysme (ce qui n’avait pas empêcher pas mal de gens d’affirmer
qu’il ne se passait rien, honte sur eux), dans le roman, place est donnée aux
dialogues, aux descriptions, aux questionnement intérieurs du narrateur, le
jeune Adso, mais aussi, comme je vous l’ai dit précédemment, ici, l’on s’attarde
sur l’histoire politique de l’époque, la rivalité entre le Pape et l’Empereur,
pour le pouvoir, bien évidemment, mais opposition également entre les tenants d’une
Eglise pauvre et partisans d’une Eglise riche, et si l’on ajoute à cela en
toile de fond les diverses hérésies, l’inquisition (mais aussi les diverses façons
de chercher la vérité ou un coupable, ce qui n’est pas la même chose), la place
du rire dans le monde, celle des lettrés (les gens d’Eglise) des princes et des
autres (bah, tout le reste) ainsi que le rôle d’une bibliothèque, de la
transmission du savoir et du danger, aux yeux de certains, que celui-ci pourrait
représenter si celui-ci tombait dans les mains des gens « vulgaires » (nous), au final, bien plus qu’une simple enquête
policière au Moyen-âge, le lecteur se retrouve avec un époustouflant récit qui
le pousse très loin dans ses retranchements et bien plus complexe qu’il ne se
serait douter ; surtout après le film.
Ainsi
donc, dans un genre complétement différent que son adaptation
cinématographique, pourtant excellente (alors que dans les grandes lignes, c’est
la même histoire), Le nom de la rose
(le roman), véritable chef d’œuvre de la littérature de la fin du vingtième
siècle comblera d’aise le lecteur qui aura su s’accrocher pour venir à bout d’un
tel monument de complexité. Hélas, reste le problème de la non compréhension
(pour beaucoups) du latin qui gâche un peu forcement l’ensemble ; sans
cela (ou bien, si je comprenais le latin), je pense que j’aurais considéré ce
roman comme l’un des tous meilleurs qu’il m’ait été donné de lire. Mais bon,
malgré ce défaut, j’ai pris, malgré un début difficile, a tant de plaisir lors
de la lecture du Nom de la rose que
je ne peux que, moi aussi, désormais, porter aux nues ce chef d’œuvre.
Et
pour finir, et tout en restant sur, justement, la complexité de cet ouvrage,
Umberto Eco a annoncé il y a quelques mois qu’il souhaiterait réécrire Le nom de la rose sous un style plus
simple, plus adapter à la génération actuelle (oui, celle qui lit sur une
tablette numérique) ; si c’était uniquement pour traduite les fameuses
phrases en latin, pourquoi pas, mais comme il parait que c’est tout le texte
qui va y avoir droit, et donc, les discussions théologiques qui passeront à la
casserole, on peut se demander si Umberto Eco ne prend pas les jeunes pour des…
hum, comment dire… oui, le mot en trois lettres, vous voyez ce que je veux dire
n’est-ce pas !? Remarquer, quand je lis certaines critiques de cette œuvre
par certains « jeunes »
(comme on peut en voir ici
mais aussi sur d’autres sites), je pense que le mot con (oups, je l’ai dit) est
parfaitement adapté à la situation.
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