LE
CONCILE DE FER
La
révolution gronde aux portes de Nouvelle-Crobuzon. Le gouvernement se fait de
plus en plus répressif, l'économie est en plein chaos, et ses habitants luttent
pour survivre. Bientôt, un complot est mené pour assassiner le maire, protégé
par la Milice aux pouvoirs surnaturels. De son côté, un groupe de rebelles
décide de trouver le maître des golems, Judas Bezalle, et le mystérieux Concile
de Fer, un train mythique qui traverse les contrées désertiques loin de la
ville. Seul le Concile de Fer pourra aider les révolutionnaires à prendre le
contrôle de la cité. Mais la Milice veille. Judas et ses compagnons, humains et
non humains, s'organisent autour du « train perpétuel » dont
l'existence semble tant effrayer le maire et ses sbires...
Le Concile de Fer
Auteur
: China
Miéville
Type
d'ouvrage : Fantasy Urbaine, Steampunk
Première
Parution : 17 septembre 2004
Edition
Poche : 13 octobre 2011
Titre en
vo : Iron
Council
Pays
d’origine : Grande-Bretagne
Langue
d’origine : Anglais
Traduction : Nathalie
Mège
Editeur : Pocket
Nombre
de pages : 736
Mon
avis : Après le chef d’œuvre absolu que
fut Perdido
Street Station puis l’excellent Les
Scarifiés, voilà qu’aujourd’hui, je vais vous
parler du troisième volume du Cycle du Bas-Lag : Le Concile de Fer !
Tout d’abord, comme ce fut le cas avec les deux œuvres précédentes de China Miéville,
j’ai eu bien du mal à m’immerger dans ce roman ; c’est que le style de cet
auteur, au demeurant superbe, est d’une complexité rarement atteinte et que,
entre un univers d’une complexité peu commune (ah, que l’on est loin du
copié/collé de base de Tolkien) où l’auteur nous présente moult races de son
invention comme si celles-ci nous étaient familières depuis toujours, mais
aussi des lieux, des habitudes culturelles à mille lieux des autres, il faut
déjà s’accrocher. Mais ce n’est pas tout : quand on connait l’habitude
narrative de Miéville, c’est-à-dire, ces multiples destins croisés (oui, qui a
un moment donné se rejoindront, forcement), ces allers retours dans le passé,
le temps que le pauvre lecteur mette tout cela en place, qu’il se familiarise avec
les noms des nombreux protagonistes, des enjeux, etc. et ben, il s’est écoulé
une bonne soixantaine de pages au minimum. Et si cela était valable pour Perdido
Street Station (que j’avais abandonné quelques semaines avant de m’y
replonger) et Les Scarifiés, cette fois ci, c’est encore pire, car
sans nul doute, après lecture, je n’ai aucun problème à affirmer que Le
Concile de Fer est l’œuvre la plus compliquée du jeune auteur
britannique. Et si j’avais pu en baver et sacrément m’accrocher auparavant, ici,
ce fut une autre paire de manches, au point que, ce ne fut que le premier tiers
du récit atteint, que je pus finalement me plonger convenablement dedans… avant
que ce diable de Miéville ne vienne, avec sa longue partie consacrée à la
genèse du Concile, remettre tout en question en coupant son roman en deux, un
avant, un après, et une genèse, longue, mais longue… Cependant, et
contrairement à certains avis que j’ai pu lire sur le net, celle-ci ne m’a pas
trop gêné. Certes, au début, j’ai été légèrement surpris par la teneur que
prenait le récit, mais une fois dedans, et malgré, effectivement, une longueur
peu commune (je ne le nie pas) qui peut surprendre, je dois avouer que j’ai été
plus qu’enchanter par celle-ci, retrouvant là le souffle épique qui, selon moi,
manquait un peu au récit dans sa première partie et qui, par la suite, ne cessa
jamais jusqu’au final. Mais cela n’a pas été, loin de là, l’avis de tout le
monde, bien au contraire. Il faut de toute façon remettre ce Concile de
Fer dans son contexte de base : c’est avant toute chose le récit
d’une révolution. Et quand on connait les opinions politiques du sieur Miéville
– il fut candidat Trotskiste aux élections municipales de Londres – cela n’a
rien d’étonnant. Certes, dans ses précédents ouvrages, seul le lecteur avisé
aura pu remarquer que de telles idées trainaient dans l’air, mais ici, comme le
souhaitais de longue date China Miéville, ce qui ressort avant toute autre
considération de ce roman, c’est la lutte des classes, les misérables conditions
de travail des travailleurs, l’oppression des classes aisées, des riches et
puissants et, bien entendu, de ces fameux révolutionnaires qui nous renvoient
tout droit à ceux de la Commune – il suffit de lire la description de quelques
combats de rues pour les croire écrites par un Victor Hugo au sommet de son
art. Et bien évidement, lorsque l’on sait cela, comment ne pas voir La Nouvelle
Crobuzon comme une espèce de Londres en pire, et son gouvernement oppresseur
digne du thatchérisme de la pire époque ? Du coup, ce parti pris
politique, assumé et revendiqué, transparait à chaque page du roman, écrasant
tout le reste de sa présence, parfois oppressante, et reléguant même, quelque
part, les protagonistes à une portion congrue. Et là, je dois l’avouer, cela n’arrange
pas les affaires de cette œuvre. En effet, lorsque l’on repense à ceux de Perdido
Street Station et des Scarifiés, assez variés et souvent
attachants, et ce, malgré des comportements que l’on ne pourrait pas qualifier
de franchement héroïque – certains n’étaient-ils pas, quelque part, assez
détestables ? – comment ne pas regretter que dans Le Concile de
Fer, si l’on fait exception de Judas Bezalle – personnage Miévillien
typique – les autres protagonistes brillent surtout par un manque, soit de charisme
évidant pour la plus part, soit d’importance pour ceux qui possédaient pourtant
un potentiel certain ? Ainsi, un exemple, un seul, le Susur, ce personnage
énigmatique des grandes plaines, ce despérado solitaire qui avait de la gueule
et qui ne joue qu’un rôle mineure dans le récit. Comment ne pas regretter que
Miéville ne lui ai pas donné davantage de consistance ? Cela étant valable
quasiment pour tout le monde, d’ailleurs. Car du coup, avec une flopée de
personnages qui auraient pu, auraient dut être autrement plus charismatiques,
il ne reste presque, dans ce roman, que cette révolution : celle du
Concile, celle de la Nouvelle Crobuzon, et puis, c’est tout. Du coup, il
apparait qu’a trop privilégier ses idées politiques a ses personnages, China
Miéville, tout en nous sortant tout de même un superbe ouvrage, rate nettement
ce qui aurait pu être un grand, un très grand roman. Car oui, Le
Concile de Fer avait tout pour être exceptionnel, après tout, entre
ses idées révolutionnaires, ses emprunts a la Commune et à la Révolution
Soviétique, son coté Conquête de l’ouest assumé – avec même, la destruction des
espèces locales que l’on peut comparer à celle des indiens – et ses nombreux
grands moments, force est de constater que la matière présente est de première
ordre. Et puis, comment ne pas s’extasier devant ce final, finalement tellement
prévisible et fort bien trouver ? Hélas, alors que tout cela aurait pu
être sublimé par des protagonistes plus charismatiques et un récit, peut-être
un peu moins propagandiste, Le Concile de Fer, plutôt que d’être le
chef d’œuvre que l’on espérait, ne sera qu’un excellent roman. C’est certes
déjà bien, mais avec Miéville, on attend tellement la perfection que nos
impressions finales, du coup, peuvent être un tout petit peu mitigées…
Points
Positifs :
- Plus
qu’un simple roman, Le Concile de Fer
est un formidable ouvrage politique, une œuvre qui s’inspire fortement de la
Commune et de la Révolution Soviétique et qui nous montre, une fois de plus, a
quel point le sieur Miéville maitrise parfaitement son sujet.
-
Une intrigue qui se met doucement en place, qui est plutôt difficile d’accès –
comme tous les ouvrages de Miéville – mais qui, une fois lancée, vous captivera
jusqu’à sa conclusion. Et pourtant, entre les divers allers retours dans le
temps, les histoires en parallèle et la partie, au milieu du roman, qui revient
sur les origines du Concile et qui casse un peu le rythme, ce n’était pas
gagner !
-
Le coté politisé à l’extrême peut vous faire peur ? Allons donc, cela
serait passer à coté d’un excellent roman car même moi qui ne suis pas du tout
d’extrême gauche, j’ai grandement apprécié cet ouvrage.
-
Si Judas Bezalle est un personnage franchement réussi. Pour les autres
protagonistes, même si on aurait souhaité que ces derniers soient davantage développés,
force est de constater que bon nombre d’entre eux sont plutôt charismatiques.
-
Le plaisir de retrouver l’univers du Bas-Lag, ses créatures, son histoire, etc.
-
Une fin douce amère comme je les aime.
Points
Négatifs :
- Une
complexité narrative encore plus importante que dans les précédents ouvrages de
China Miéville.
-
Ouvrage très politisé, Le Concile de Fer
risque d’en rebuter plus d’un de par ses thématiques, ce qui, accessoirement,
serait dommage au vu de la qualité générale de l’ensemble.
Ma
note : 9/10
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire