LE
CYCLE D’ELRIC – L’ÉPÉE NOIRE
Le
sorcier fou, revenu de l'enfer sain et sauf, frissonnait de peur; il voyait un
peu l'avenir et savait qu'Elric l'attaquerait. Alors il nomma la créature et
elle s'éveilla. Bientôt elle goûterait l'appétissante saveur de l'âme humaine.
La plainte du Géant du vent déchaîna le chaos sur toute la Terre, l'épée
d'Elric se leva et s'abattit en hurlant un chant de mort. Le sorcier se
rongeait les ongles en piaulant misérablement; partout les combattants
luttaient, saignaient et mouraient. L'épée noire, échappant au prince albinos,
prenait racine dans les chairs, les tendons et les viscères; elle gémissait de
plaisir en lapant la substance des vivants. Elric n'était pas responsable, il
jouait son rôle; il était le Porte-Épée.
Le Cycle d’Elric – L’épée Noire
Auteur
: Michael
Moorcock
Type
d'ouvrage : Dark Fantasy
Première
Parution : 01 octobre 1977
Edition
Française : 28 février 2006
Titre en
vo : The
Bane of the Black Sword
Pays
d’origine : Royaume-Uni
Langue
d’origine : anglais
Traduction : Bénédicte
Lombardo
Editeur : Pocket
Nombre
de pages : 192
Mon
avis : L’on revient enfin, avec ce
septième tome du Cycle
d’Elric, au fondement même de la saga avec des textes écrits tout juste
après ceux de Elric
le Nécromancien c’est-à-dire, datant du tout début des années 60, et si
le style, forcement, et fort différent de celui de La
revanche de la Rose, plus simple en quelques sortes, l’intrigue en
elle-même n’en est pas moins intéressante. Il est clair que ce n’est pas
toujours évidant de lire ce cycle vu que les différents tomes ont été écrits
sur des décennies et dans le désordre, mais bon, au final, la qualité est
présente et même si tous les volumes ne sont pas forcement égaux, ils ont tous
leur importance et ce qui est sur, c’est que cette Épée Noire, sans atteindre des sommets, n’en est pas moins indispensable
a la compréhension du cycle, ne serais-ce que par certains événements qui y
sont décrits. Composé de quatre nouvelles, liées entre elles sauf la dernière
où Elric n’apparaît pas, L’Épée Noire
permet au lecteur de retrouver le prince albinos, accompagné de son compagnon
Tristelune, aux prises avec son ennemi mortel, le sombre sorcier de Pan Tang,
Theleb K'aarna, ses retrouvailles avec les derniers représentants de son peuple
en exil, sa rencontre avec celle qui deviendra son épouse, la jeune Zarozinia,
le faisant croire pendant un temps en une paix définitive et sa lutte
désespérée contre des hordes implacables venant de l’est fortement inspirées
par les Mongols et les Huns. Ces trois nouvelles, Le Voleur d'âmes, Les Rois
oubliés et Les Porteurs de flammes,
de bonne facture, sont certes courtes, dans la lignée des premiers textes du
cycle, mais suffisamment passionnantes pour maintenir l’intérêt du lecteur.
D’ailleurs, celles-ci sont bien la preuve qu’il n’est nul besoin de pondre des
monstruosités de dix tomes et de 700 pages par volume, où le superflu est bien
trop présent : la description de la sombre forêt de Troos, dans Les Rois oubliés, sur quelques lignes,
retranscrit parfaitement l’ambiance maléfique de celle-ci ainsi que toute la
crainte que l’on pourrait ressentir à la traversée, bien plus en tout cas que
des descriptions équivalentes, dans d’autres romans, mais qui se prolongeraient
sur deux ou trois pages pour un résultat pas forcement autant réussis… Dans Le Voleur d’âmes, le duel final entre
Elric et Theleb K'aarna, sa némésis pendant quelques volumes, à lieu même si l’on
peut regretter qu’il soit trop court, et, fatalement, dans un affrontement
apocalyptique, le sorcier de Pan Tang, finit par succomber, mais la victoire,
comme souvent dans ce superbe cycle, est forcement amère puisque le Prince
albinos perdra l’un de ses vieux compagnons. Encore et toujours le Destin,
implacable, qui ne peut être dévié et qui donne une ambiance fataliste à la
saga qui en fait tout son charme. Le lecteur pourra être un peu perplexe devant
la rapidité avec laquelle Elric succombe à l’amour dans Les Rois oubliés, deuxième nouvelle de l’œuvre, mais celle-ci n’en
est pas moins l’un des grands moments de ce septième volume. Personnellement,
cette histoire de Rois, l’actuel, celui qui perdit son trône et le dernier,
celui qui dort sous la colline, était plutôt réussie : même dans les pires des
situations, les ennemis du Loup blanc, dans ce cas, les habitants d’un royaume
décadent d’un coté et de l’autre, une espèce de momie et ses goules, ont du
soucis à se faire, et le massacre final est à glacer le sang. La troisième
nouvelle, Les Porteurs de flammes,
possède un final tout autant sanglant, mais cette fois ci, la menace, moins
surnaturelle, n’en est pas moins dangereuse, au contraire : cette horde
d’envahisseurs venu de l’est, dont la ressemblance avec les mongols est plus
qu’évidente, qui écrase tout sur son passage, force Elric, qui pensait avoir
trouver la paix, à reprendre du service et nous montre bien que, malgré toute
sa volonté, son destin est tracé et que son lien à Stormbringer ne disparaîtra
jamais. Trois nouvelles donc assez semblables à la fois dans le fond et la
forme, où Elric et ses alliés ont à faire a chaque fois à des armées, où les
affrontements pullulent et où le sang ne cesse de couler ; trois nouvelles où
l’action prime plus que la réflexion mais où celle-ci n’est pas entièrement
absente, et où la mélancolie et le fatalisme des protagonistes principaux,
ainsi que leur sort, l’emporte sur tout le reste. Dommage que ces nouvelles soient
beaucoup trop courtes car quelques pages de plus a chaque fois n’aurai pas été
du superflu, bien au contraire… Un peu à part, la dernière nouvelle, Sauver Tanelorn, clôt ce septième volume
du Cycle d’Elric et si celui-ci en
est absent, l’on retrouve avec plaisir Rackhir, l'archer rouge, qui se lance
dans une redoutable course contre la montre afin de sauver la citée mythique,
menacée par les forces du Chaos. Et si j’aime bien ce personnage et que j’ai apprécié
les divers mondes décrits dans sa recherche d’alliés, il est incontestable que
l’on a là le point faible du roman, vu que les événements se bousculent trop
rapidement sans que l’on s’y attarde véritablement. Du coup, entre cette
nouvelle qui est franchement dispensable et les autres, plutôt réussies mais
bien trop courtes, il apparait que L’Épée
Noire n’est pas un grand volume du Cycle
d’Elric, cependant, pour certains des événements qui y ont lieux et pour
quelques bonnes idées, comme le fait que notre héros, sous l’entremise de Zarozinia,
réussit a se passer pendant un temps de Stormbringer, il apparait que sa
lecture n’en reste pas moins indispensable pour la compréhension de l’œuvre culte
de Moorcock.
Points
Positifs :
-
Entre la mort de Theleb K'aarna, la némésis d’Elric, la rencontre entre ce
dernier et la jeune Zarozinia qui réussit a remplacer, dans son cœur, la douce
Cymoril, et le fait, important, que notre héros mélancolique réussit enfin a se
passer de Stormbringer, force est de constater qu’il se passe des choses très
importantes dans la vie d’Elric dans ce volume.
-
Des nouvelles malheureusement trop courtes mais qui n’en restent pas moins plutôt
plaisantes a lire ; il faut dire que si Moorcock n’a jamais été un grand
écrivain, ses idées, elles, sont souvent pertinentes voir captivantes par moments.
-
Même si l’on peut regretter que l’histoire d’amour entre Elric et Zarozinia
soit un peu trop rapide, force est de constater qu’elle nous permet de
découvrir un Elric fort différent, ce qui est une évolution intéressante du
personnage ; mais ne nous inquiétons pas, il reste toujours aussi
mélancolique par moments, pour ne pas dire fataliste devant le destin…
-
La nouvelle Les Rois oubliés est la
plus réussie de ce volume, et puis, l’histoire de ces trois rois est
franchement réussie.
-
Le plaisir de retrouver Rackhir, l'archer rouge.
Points
Négatifs :
-
Dans la lignée des premiers tomes écrits par Moorcock, les nouvelles qui
composent ce roman sont beaucoup trop courtes, du coup, celles-ci gardent un
arrière gout d’inachevée et auraient méritées, indéniablement, quelques pages supplémentaires
chacune…
-
Le style de Moorcock est franchement trop simpliste par moments et a un poil
mal vieillit.
-
La nouvelle Sauver Tanelorn est
certes sympathique mais ne restera pas dans les annales, bien au contraire.
Ma
note : 7/10
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