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mardi 27 décembre 2011

LA PIEL QUE HABITO



LA PIEL QUE HABITO

Depuis que sa femme a été victime de brûlures dans un accident de voiture, le docteur Robert Ledgard, éminent chirurgien esthétique, se consacre à la création d’une nouvelle peau, grâce à laquelle il aurait pu sauver son épouse. Douze ans après le drame, il réussit dans son laboratoire privé à cultiver cette peau : sensible aux caresses, elle constitue néanmoins une véritable cuirasse contre toute agression, tant externe qu’interne, dont est victime l’organe le plus étendu de notre corps. Pour y parvenir, le chirurgien a recours aux possibilités qu’offre la thérapie cellulaire. Outre les années de recherche et d’expérimentation, il faut aussi à Robert une femme cobaye, un complice et une absence totale de scrupules. Les scrupules ne l’ont jamais étouffé, il en est tout simplement dénué. Marilia, la femme qui s’est occupée de Robert depuis le jour où il est né, est la plus fidèle des complices. Quant à la femme cobaye…

Ce n’est certes pas la première fois que je vous le dit en écrivant une critique (qu’elle soit d’un film, d’un roman ou d’une BD) mais je vais le refaire car cela me semble nécessaire de me répéter : il m’est décidément bien plus difficile d’écrire une critique positive d’une œuvre qu’une négative. Pour quelle raison ? Peut-être tout simplement parce que pointer les doigts les défauts d’une œuvre, en dire du mal, la descendre allègrement est chose aisée, surtout quand cela est fort méritée. Cependant, et je regrette de ne pas avoir le talent pour, louer les qualités comme, dans le cas présent, d’un film réussi, m’est bien plus difficile. Peut-être qu’avec le temps, j’y parviendrais plus facilement, du moins, je le souhaite, mais quoi qu’il en soit, pour le moment, je tiens à m’excuser par avance si la critique suivante n’est pas à la hauteur de ce que j’aurais souhaité, surtout qu’elle méritait bien mieux.

Ceci étant dit, il est temps de s’attaquer au nœud du problème, je veux bien évidement parler de la dernière œuvre de l’inimitable réalisateur espagnol, le célèbre Pedro Almodovar, La piel que habito. J’ai eu l’occasion, au cours de ma vie, de voir bon nombre de films de celui-ci mais assez curieusement, sur ce blog, je ne vous avais proposé jusqu’à maintenant qu’une seule et unique critique de l’une de ses œuvres, Etreintes brisées il y a de cela près de deux ans déjà. Pourtant, j’aime bien les films d’Almodovar, et ce, même si comme cela m’arrive souvent, il m’aura fallu bien des années pour savoir en apprécier toute les subtilités de ceux-ci. Mais désormais, je suis toujours partant pour voir, ou revoir, n’importe laquelle de ses œuvres et, accessoirement, il faudra bien qu’un de ces quatre matins, je me retape La mauvaise éducation, acheté il y a déjà quelques mois et que j’avais particulièrement bien apprécié lorsque je l’avais vu la première fois. Mais là n’est pas la question puisqu’il est temps de découvrir ce que vaut vraiment ce fameux La piel que habito.

La peau que j’habite, traduction en français du titre de ce film (d’où l’intérêt de le garder en version originale) est probablement l’une des œuvres d’Almodovar qui aura fait couler le plus d’encre parmi ses nombreux fans : en effet, depuis sa sortie, c’est fou le nombre d’avis contraires que j’ai pu lire à son sujet entre ceux qui adorent, le portant aux nues, et les autres que le descendent allègrement – et je ne prends pas en compte les avis des non connaisseurs du maitre, sinon, on n’en sort pas. Bref, cela pour vous dire que La piel que habito est tout sauf une œuvre consensuelle. Pourtant, de prime abord, l’on retrouve dans ce film tout ce que j’appellerais être le « folklore » ou plus exactement la matière commune au réalisateur espagnol : rapport compliquer a la mère, sexualité ambivalente, personnages tourmentés au possible et brisés par le destin, ce qui fait qu’immédiatement, l’on se trouve en territoire connu. De même, comme à chaque nouveau film, il faut un certain temps pour rentrer véritablement dans l’histoire car tout, bien évidemment, n’est pas simple, les situations croisées, les divers allers retours dans le temps ne sont pas évidentes à comprendre tant que l’intrigue n’avance pas. Mais là aussi, l’on se trouve en territoire connu. Mais dans La piel que habito, tout cela, tous ces éléments sont poussés à leur paroxysme et l’on atteint assez rapidement des sommets insoupçonnés et rarement atteints dans le cinéma au point que certaines scènes soient tout bonnement indicibles et puissent en choquer plus d’un. D’ailleurs, est cela qui aura déplu à plus d’un spectateur ? Cette montée en avant dans l’horreur tant psychologique et physique par un Almodovar qui repousse encore plus loin ses propres frontières ? Probablement est-ce une explication ; personnellement, j’ai adoré, mais je peux concevoir parfaitement que ce parti pris assez dur ait put déplaire a pas mal de monde.

Mais arrivé à ce point de ma critique, je me retrouve devant un problème cornélien : aller plus loin dans celle-ci signifierait dévoiler une bonne partie de l’intrigue et, du coup, enlever tous les éléments de surprise qui font toute la force de cette œuvre. Or, cela, je ne m’y résous pas car si quelqu’un lirais ce billet sans avoir vu le film, tout le plaisir de la découverte serait irrémédiablement gâché. La seule chose que je peux vous dire, c’est que sous une esthétique d’une précision chirurgicale, Almodovar nous entraine très loin dans la folie des hommes dans ce Piel que habito : avec un scénario diabolique au possible, des personnages forts et sublimés par les prestations extraordinaires des acteurs – Antonio Banderas, que l’on ne voyait plus aussi bon depuis des siècles, Marisa Paredes, probablement la plus grande actrice ibérique et l’étonnante Elena Anaya qui vous en fera voir de toutes les couleurs – et certaines scènes insoutenables au possible, il me parait indéniable que La piel que habito est l’un des grands films de cette année 2011 et qu’une fois de plus, Almodovar nous prouve à nous autres cinéphiles sont incomparable talent. 

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