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vendredi 23 juin 2017

LA TRILOGIE DE LA QUÊTE D’EREKOSË


LA TRILOGIE DE LA QUÊTE D’EREKOSË

Je suis John Daker, victime des rêves du monde entier. Je suis Erekosë, Champion de l’Humanité, qui extermina la race humaine. Je suis Ulrik Skarsol, Seigneur de la forteresse Gelée, qui porta l’Epée Noire. Je suis Ilian de Garathorm, Elric le Tueur de Femmes, Hawkmoon, Corum et tant d’autres, hommes, femmes ou androgynes. Je fus tous ceux-là. Et tous sont des guerriers engagés dans l’éternelle Guerre de la Balance, cherchant à préserver la justice dans un univers sous la menace perpétuelle d’un Chaos qui gagne du terrain, à imposer le Temps à une existence sans commencement ni fin. Et pourtant, cela n’est pas ma vraie malédiction…


La Trilogie de la Quête d’Erekosë
Auteur : Michael Moorcock
Type d'ouvrage : Fantasy
Première Parution : 1970, 1970, 1986
Edition Française : 26 avril 2007
Titre en vo : The Eternal Champion, Phoenix in Obsidian, The Dragon in the Sword
Pays d’origine : Royaume-Uni
Langue d’origine : anglais
Traduction : Arnaud Mousnier-Lompre
Editeur : Pocket
Nombre de pages : 864

Mon avis : Après de longs mois, je suis finalement venu à bout (si l’expression est véritablement celle qui convient) des quatre cycles majeurs du Champion Eternel de Michael Moorcock. Ainsi, après ElricHawkmoon puis Corum, il était temps, bien entendu, de découvrir Erekosë, la fameuse incarnation du Champion dont le privilège, ou plutôt la malédiction, est de se souvenir de toutes ses incarnations, passées et futures. Cependant, avant d’aller plus loin et de développer ma critique du cycle qui nous préoccupe aujourd’hui, je tenais à avouer en toute franchise que j’étais assez dubitatif avant de me plonger dans la lecture de La Trilogie de la Quête d’Erekosë. Tout d’abord, le personnage en tant que tel ne m’attirait pas plus que ça : entre Elric, la classe à l’état pur, Hawkmoon certes moins charismatique mais à l’univers si riche et un Corum qui ne souffre aucunement de la comparaison avec le Prince albinos, Erekosë, lui, me paraissait un ton en dessous ; certes, le fait qu’il se souvienne de ses autres incarnations était un postulat de base plutôt intéressant et original, mais a part ça, j’avais du mal a imaginer ce que l’auteur, passé les premières pages, pouvait en tirer, surtout que les quelques critiques lues ici et là ne m’inspiraient pas une grande confiance. Et comme le peut de fois où le personnage était apparu dans les autres romans de ses « avatars », il ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable, je reconnais que ce fut avec une certaine méfiance et sans attendre grand-chose que j’ai abordé la Quête d’Erekosë. Cependant, avant de renter dans le vif du sujet, une petite précision s’impose au sujet de ce cycle. La présente édition, de chez Pocket, regroupe les trois volumes du cycle d’Erekosë : Le Champion ÉternelLes guerriers d’argent et Le Dragon de l’épée. J’aurais put vous proposer trois critiques différentes qui se seraient succédées, ce qui, d’ailleurs, au vu de la longueur de ceux-ci en comparaison avec ceux d’Elric et consorts n’auraient pas dénotés, bien au contraire mais après une courte hésitation, je me suis décidé pour un unique article, diviser en trois. Les deux premiers romans sont liés puisque écrits à la même époque (1970), le dernier, lui, est bien plus récent et est un peu à part. Ainsi, dans Le Champion éternel, le lecteur fait donc connaissance avec Erekosë dans le premier roman qui lui est exclusivement consacré, au titre révélateur qui veut tout dire à lui tout seul. Disons le tout de suite, ce récit est bien plus profond que l’on pourrait le croire de prime abord. En effet, bon nombre des détracteurs d’Erekosë ont, au fil des ans, critiquer cette œuvre sous le prétexte, pas forcement faux d’ailleurs, que Moorcock use jusqu'à n’en plus soif son idée de départ sur le fait que son héros se souvient de ses incarnations successives. Cette critique, que je ne nie pas, est certes fondée pour les deux premiers volumes du cycle, pourtant, cela serait réducteur de les écarter uniquement par ce fait : en effet, puisque Erekosë a le malheur (oui, qui aimerais être a sa place ?) de se souvenir d’un nombre incalculable d’autres vies, il me semble logique et normal que l’auteur en face mention à de multiples reprises au fil du récit et que cette malédiction ne soit pas occultée. Alors oui, l’on se retrouve du coup avec un personnage qui se lamente énormément, voir trop ; mais deux choses sont à prendre en considération : Elric fait de même et tout le monde trouve cela génial, quant à Hawkmoon, il devient justement intéressant lorsqu’il souffre et se lamente, les premiers tomes, franchement, ce n’est pas trop ça. Nous avons donc un personnage, Erekosë avec de la profondeur, troublé (on le serait aussi à sa place) et qui ne se sent pas vraiment chez lui dans le monde où il débarque. Mais là où Moorcock fait très fort, c’est dans une intrigue qui très rapidement, va prendre, malgré les apparences, un chemin tout bonnement contestataire et dénonciateur de la folie des hommes : effectivement, lorsque l’on lit Le Champion éternel, comment ne pas y voir que plus qu’un simple récit de Fantasy parmi tant d’autres, une œuvre forte (oui, j’ose mes mots) qui nous montre a quel point la haine de tout ce qui est différent, la peur de l’autre, le racisme peut entraîner l’Homme dans une folie destructrice, meurtrière et génocidaire ; car Erekosë, Champion de la race humaine appelé pour éradiquer les Xenans, que l’on accuse de tous les maux et bien plus encore, s’apercevra bien vite que la folie et le radicalisme n’est pas du coté qu’il croyait, au point de trahir sa propre race. Mais chut, j’en ai trop dit et je laisse au lecteur le plaisir de découvrir sans tarder un récit intense et bien trop rare à mon goût. Un récit qui, par le biais du fantastique et du merveilleux, donne à faire réfléchir sur le comportement humain en général. Sincèrement, un régal. Pour ce qui est des Guerriers d’Argent, mon enthousiasme, malheureusement, a dut baisser d’un ton. En effet, si Michael Moorcock avait atteint des sommets avec Le Champion éternel, force est de constater que la suite est d’un tout autre acabit et que, les critiques que certains ont put faire à la série trouvent ici toute leur justification. Car Erekosë, appelé dans un autre monde, dans un lointain futur ( ?), gelé, sous un soleil rouge et en fin de vie, un monde morne où ses rares habitants, désabusés, attendent sans espoir leur morts, se contente ici, en toute franchise, de se lamenter (avec plus de raisons puisque en plus, il est arraché à celle qu’il aime), d’accomplir sa quête sous l’identité d’Ulrik dans un récit qui se laisse lire mais qui n’a pas la force de son prédécesseur, loin de la. Sans être mauvais, le synopsis de ces Guerriers d’argent n’est qu’un banal récit de Fantasy, sans nouveautés et qui ne surprend plus le lecteur, l’effet de surprise du premier volume étant passé. Alors oui, j’ai passé un bon moment à sa lecture, mais bon, sans plus et après coup, je dois admettre que celui-ci ne restera pas dans les annales. Ce n’est pas une question de qualité intrinsèque (l’histoire est bonne) mais disons qu’elle aurait put se suffire a elle-même et qu’elle n’apporte pas grand-chose à l’ensemble. Bref, vous l’avez compris, à mille lieux du Champion éternel, ces Guerriers d’argent, s’ils comportent quelques bons moments, sont loin d’être indispensables, sauf, bien entendu, pour la compréhension du cycle dans son ensemble. Le Dragon de l’épée est heureusement d’un tout autre acabit. Ecrit vers la fin des années 80, a la même époque que deux titres d’ElricLa Forteresse de la Perle et La revanche de la rose, il en est assez semblable par la forme et le style d’écriture, bien plus élaborer que dans les premiers écrits de Moorcock. Du coup, il dénote assez avec les deux premiers récits du cycle, en particulier par la forme et surtout, donc, par le style, bien plus complexe et où les descriptions ont gagné en profondeur. Mais cette évolution dans le style littéraire n’est pas forcement un gage de qualité a première vu ; après tout, rien ne nous garantissait que ce dernier tome des péripéties d’Erekosë soit une réussite. Mais heureusement, comme le lecteur s’en aperçoit assez rapidement au fil des pages, Le Dragon de l’épée est un très bon récit de l’auteur britannique qui a sut, une fois de plus, tenir en haleine ses lecteurs avec un texte fort, profond, et qui, par certains cotés (et malgré toutes les dissemblances dut aux deux décennies d’écart) ressemblent a son prédécesseur, Le Champion éternel. Car une fois de plus, ce n’est pas à un simple récit de Fantasy que l’on aura droit tant les sujets abordés, si l’on sait bien lire entre les lignes (et encore) sont nombreux. Si dans le premier volume du cycle, c’était la guerre et le racisme qui étaient dénoncés principalement, cette fois ci, c’est les totalitarisme, les dictateurs et les façons dont ceux-ci parviennent au pouvoir, et contrôlent leur peuple, qui est mis en avant, avec un parallèle plus que judicieux avec Hitler et le nazisme, par le biais d’un personnage, Von Beck, avatar a la fois du Champion et du Compagnon, suivant le lieu et le temps où celui-ci (et les autres membres de sa famille) est utilisé. Ainsi, en plus d’un récit très réussi et captivant, même si pas forcement original (sauvez le monde, récupérer une épée, des méchants très méchants etc.), Moorcock réussi à transcender son œuvre en lui donnant un coté engagé de bon effet. Mais ce n’est pas tout et ce n’est pas seulement le totalitarisme qui est dénoncé dans ce troisième volume de La Quête d’Erekosë : en effet, par le biais de son personnage principal et de sa lute incessante entre ses diverses identités, l’auteur nous montre, le plus naturellement du monde, que le simple fait de savoir qui on est véritablement et de l’accepter, vaut tous les hauts faits héroïques du monde. Oui, c’est John Daker qui l’emporte sur Erekosë, Ulrik, et tous les autres à la fin, oui, c’est John Daker qui fait que, les six Royaumes sont sauvés, et c’est finalement John Daker qui, à la fin, est récompensé de ses efforts en obtenant un repos bien mérité, les dernières lignes étant assez forte a mon avis lorsque Moorcock nous dit, par le biais de son héros, que notre monde est tout autant fantastique que ceux qu’il a put parcourir, qu’il y autant de mérite à y vivre que partout ailleurs. Un constat simple et qui serait bon pour tous ceux qui rêvent d’une autre vie, soit disant plus merveilleuse, en oubliant, tout bonnement, de vivre la leur. Franchement, un excellent roman, sans aucune contestation possible. Alors, mes craintes de départ en ce qui concernaient Erekosë ? Envolées, bien entendu à la suite de ces trois récits (moins le deuxième tout de même, loin d’avoir la force des deux autres) qui, sincèrement, m’ont plus qu’agréablement surpris. J’étais très loin de m’attendre a tant de qualités en lisant La Trilogie de la Quête d’Erekosë et ce fut donc avec surprise que je l’aie dévoré, y prenant énormément de plaisir. Franchement, je conseille vivement la lecture de ce cycle à tous les amoureux de Moorcock, aux amateurs de Fantasy en général, mais aussi, à tous ceux qui aiment réfléchir et ne pas se contenter de lire des œuvres fades, sans grand intérêt.


Points Positifs :
- Une excellente compilation des trois romans du cycle d’Erekosë et qui rend justice a un héros trop souvent oublié ou mis de coté chez les fans de Moorcock qui lui préfèrent le flamboyant Elric ou Corum et Hawkmoon. Personnage fort complexe, qui a la malédiction de se souvenir de toutes ses vies passées et futurs, Erekosë se révèle être un avatar du Champion Eternel bien plus intéressant que prévu.
- Le Champion Eternel, le premier roman, est un pur bijou tant par son intrigue, rapidement captivante, que pour ce qu’il dénonce, c’est-à-dire, le racisme, la haine de ce qui est différent et la guerre dans son ensemble. Un beau petit plaidoyer a l’acceptation de l’autre et qui n'a pas prit une ride, même de nos jours.
- Le Dragon de l’épée, plus récent puisque datant des années 80, n’en reste pas moins plutôt bon dans l’ensemble. Voilà aussi un roman qui, sous couvert d’un récit de Fantasy, est un beau petit brulot contre les totalitarismes en tous genres.
- La présence d’Ulrich von Beck dans Le Dragon de l’épée, autre avatar du Champion Eternel et qui tient lieu ici de compagnon a Erekosë.

Points Négatifs :
- Pour ce qui est des Guerriers d’Argent, si ce roman se laisse lire et est plutôt plaisant, il est largement inférieur aux deux autres, de plus, il fait un peu doublon avec le premier.
- Si Le Dragon de l’épée clôt fort bien cette intégrale, il faut reconnaitre qu’il possède quelques petites faiblesses, l’intrigue possédant un petit coup de mou vers le milieu de celle-ci.

Ma note : 8/10

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